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 Requiem pour une vierge

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3 participants
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Bloody Rose

Bloody Rose


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Date d'inscription : 14/11/2006

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MessageSujet: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptySam 18 Nov - 10:20

Voici une de mes nouvelles. Je compte la reprendre dans quelques temps pour en faire un roman.

Les cloches résonnent dans la cathédrale. Elle regarde derrière le vitrail, ignorant qui l’observe dehors à travers la nuit. Les cierges autour d’elle brillent de mille éclats, et mon cœur brûle d’un feu soudain inconnu. Elle se met à genoux pour prier comme elle le fait chaque jour, chaque heure et chaque minute de sa vie. Je la regarde et je vois la grâce dissimulée sous sa robe obscure de nonne. Mes yeux se posent sur le crucifix qu’elle porte autour du cou, et ceux-ci ne faiblissent, ni ne se détournent. Elle est l’innocence, elle est la pureté, une icône que mon âme pourtant damnée commence déjà à vénérer.
- Seigneur détourne moi du péché, murmure-t-elle de sa petite voix angélique. Donne moi la force de résister à la tentation. Je te serai fidèle pour l’éternité en retour.
Je veux entrer et l’approcher, mais la peur me possède plus que toutes celles qui m’ont hantée dans ma vie. Sa vertu est comme un danger, un outrage à ma propre nature, et sa beauté est telle que sa dévotion en devient un crime. Je lis le sacrifice dans ses pensées, la foi qui règne en elle, ce charme insoutenable qui me répète sans cesse qu’elle m’est interdite. Je la désire, le souffle coupé par les larmes, comme si cette enfant promise au ciel était le plus beau présent qu’on puisse me donner.
Discrètement, je me faufile dans l’entrée et me glisse le long des murs. L’air est soudain froid autour d’elle et les chandelles s’éteignent sous mon passage. Elle tremble, elle grelotte et se relève finalement.
« Ne me tente pas, démon » semble-t-elle implorer. Mais les mots et les menaces ne sortent pas de ses lèvres immaculées pour lesquelles je braverais tous les enfers. Elle regarde le Christ comme son seul maître et se signe presque devant moi, moi qui reste dans l’ombre, et qui demeure prisonnière de la haine et de l’amour… pour celle qui ne détourne son âme du droit chemin…

*

Il faisait jour la première fois que nous nous sommes rencontrées. Je n’étais alors qu’une noble demoiselle de seize ans, héritière d’une très grande fortune et destinée à un avenir prometteur. Je ne manquais de rien et avais toutes les raisons d’être heureuse. Mais mes nuits devenaient agitées et nul ne savait d’où me venait ce mal. Dans mes rêves, je recevais souvent la visite d’un jeune homme étrange qui tentait de me séduire et qui voulait m’infliger ses cruels baisers. Je m’affaiblissais de jour en jour, et mon père de plus en plus inquiet et impuissant, avait fini par me laisser aux soins des sœurs du couvent voisin afin qu’elles tentent de me libérer du virus qui sévissait en moi. Mon état devenait de plus en plus troublant, et bientôt je fus incapable de quitter le lit.
C’est ainsi qu’un matin, elle vint s’asseoir à mon chevet. Les autres sœurs, dépassées par l’étrangeté de ma langueur, l’avaient chargée de me rendre visite et de m’examiner, elle dont la foi était inébranlable. Avec une tendre douceur, elle essuya mon front trempé de sueurs, et ses petites mains frôlèrent les courbes de mon visage et de mon cou. Elle retint un cri lorsque ses doigts touchèrent les deux minuscules plaies qui ornaient ma nuque, et aussitôt son regard se figea. Elle ouvrit nerveusement sa bible, et tremblante, elle pria pour mon âme durant des heures, laissant imprimés dans mon esprit d’atroces maux de tête.
« Cette enfant ne survivra pas, l’entendis-je chuchoter le soir même à ses compagnes. Elle porte d’étranges marques sur elle ».
Et en effet, le lendemain soir on m’avait crue morte, et promptement enterrée dans le caveau de ma famille. Je m’étais éveillée dans mon tombeau sous les coups de minuit, et son visage n’avait cessé de me hanter, comme jamais celui de l’inconnu qui me rendait visite dans mon sommeil ne l’avait fait. Celui-ci je l’avais déjà oublié comme on tente de se voiler l’image de son bourreau. Mais elle, celle qui m’avait livrée si facilement aux bras de La Mort, je me devais de la revoir.
Le cercueil ne céda pas facilement sous mes coups. Hantée par son image, je martelai de toutes mes forces le couvercle de marbre. Je hurlai, je pleurai jusqu’à m’en arracher la gorge, possédée par la peur. Ma voix qui l’appelait si fort résonnait dans les entrailles de ma sépulture comme ma seule et unique délivrance. Je voulais encore voir ce visage, contempler cette beauté que même la Mort n’avait pu m’empêcher de voir dans mes derniers instants. Et j’étais toujours en vie, plus que jamais vivante, animée par le désir qu’elle embrasait désormais en moi. Mes ongles rayaient le cercueil de l’intérieur, je poussai toujours plus fort, et finalement, j’émergeai du sol comme une créature qui renaît de ses cendres. Le ciel autour de moi, ne me parut jamais si sombre. Dans un élan de tristesse, je criai et je hurlai de nouveau. La terreur était présente, et le feu qu’avait animé son toucher exquis en moi se réveilla complètement.
Mes lèvres voulurent libérer un nom, mais celui-ci demeurait encore inconnu à mon esprit.

*

Epiphana… c’est ainsi que l’appellent tous les fortunés qui ont eu l’honneur de croiser son chemin. Elle se tient face à moi, tremblante, ses traits pâlissent soudain, et je peux alors lire la moindre de ses pensées. Son cœur s’ouvre à mon esprit sans qu’elle ne m’en ait donné la clef, et seul Dieu y règne. Ou du moins, jusqu’à cet instant…
Je lui lance un regard qu’elle ne peut éviter. Elle se trouble, puis semble ne pouvoir détacher ses yeux de ma personne. Elle me contemple comme elle n’a jamais pu contempler aucune femme, et ses joues bientôt se colorent. Je la sens effrayée. Peut-être m’a-t-elle reconnue et croit voir un spectre face à elle. Je lui parle tendrement et je la remercie de ses bienfaits. Elle recule de terreur, joint ses mains en signe de supplication et implore Dieu de ne pas laisser ses yeux se faire abuser.
- Ce… ne peut être… vrai, balbutie-t-elle. Est-ce une illusion… que je vois devant moi ? Est-ce bien vous… vous, la jeune fille… qui souffrait d’un mal inconnu… et que l’on a enterrée… il y a quelques jours ? Comment cela est-il possible ?
Mon sourire la déstabilise davantage. Je me rapproche d’elle et je frôle son visage voilé de mes doigts glacés. Elle frémit un instant, puis elle semble ne plus se contrôler et se laisse aller à mon étreinte.
- Vous me demandez cela ma sœur, mais n’est-ce pas vous qui croyez aux miracles ?
Elle ferme les yeux pour ne point faillir à la vue d’une beauté qu’elle n’a jamais remarquée avant. Elle ressent le péché en moi, et pour la première fois, elle ne peut le rejeter. Mon désir s’amplifie, et je lis en elle qu’il n’a d’égal que celui qu’elle essaie en vain de chasser de son esprit.
Elle tente de se détourner de moi, brandit son crucifix dans ma direction. Ses larmes l’aveuglent tandis que je dépose un baiser d’adieu sur sa joue.
« Nous nous reverrons Epiphana. Lorsque la lune se lèvera de nouveau je reviendrai, et je sais que tu m’attendras. »

*

Elle attend en effet ce soir là. Elle se tient de nouveau au centre de la cathédrale, mais cette fois elle ne prie pas. Je m’avance lentement jusqu’à elle, et la peur ne la hante plus lorsqu’elle se tourne vers moi.
- Que me veux-tu ? demande-t-elle.
Son regard me scrute avec fascination. Je l’étudie moi-même et je la revois soudain penchée au-dessus de mon lit tandis que je souffre mille tourments. Je me rappelle de ses mains posées tendrement contre les miennes, de son baiser de sainte offerte à mon front. Et je l’aime, je l’aime depuis le premier jour où je l’ai vue, depuis que mon âme déjà vouée à la malédiction du sang n’a de désir que de la détourner de celui pour qui elle vit.
Je tends les bras devant elle, et elle semble totalement possédée. Dans une étreinte, je la serre contre moi avec la terrible sensation que mon cœur va cesser de battre. Elle ne lutte plus, elle me laisse faire, comme si la pureté même était capable de se laisser tenter. Mon corps tout entier ne sait comment se contrôler. Bien que je sois faite de nuit et elle de lumière, elle semble soudain éveillée par un nouveau désir, et mes lèvres bientôt lui font découvrir combien la luxure est délicieuse.
Son voile cède en peu de temps à nos caresses. Je contemple la cascade de cheveux d’or qui s’écoule de son dos. Sa robe délicatement glisse sur la soie de sa peau de vierge. Mon regard est aveuglé. Elle est la beauté même enchaînée à un être qui ne fera jamais les louanges de ses grâces. Et je suis là face à elle, je la délivre de sa dévotion plus promptement qu’elle n’a mis de temps à s’y attacher.
Le désir est si intense qu’il me semble qu’un poignard est en train de transpercer mon cœur. Blottie contre moi, elle connaît bientôt la morsure de mon baiser dans sa nuque. Je m’accroche à elle, prise d’une passion violente. Elle pleure et elle crie. La vertueuse me maudit et tombe à genoux. Pour la première fois de toute sa vie, elle ressent de la haine, et ce sentiment si vif est à mon intention, moi qui d’un geste d’amour, suis parvenue à détourner son âme vouée au ciel.

*

Le soir vient tout juste de tomber, et je m’éveille comme chaque nuit de mon tombeau, le cœur empli d’une douleur qui n’a pas de mots ni de larmes pour être exprimée. Le souvenir me torture en ce jour funeste. Je la revois, celle que j’ai damnée, effondrée sur le sol, suppliant le Christ, la Vierge Marie et Dieu lui-même de lui pardonner le péché qui est en elle.
« L’amour n’est pas un péché, Epiphana, lui ai-je dit ». Mais mon être tout entier en revanche en était un pour elle, moi qui ne vivait désormais que grâce à l’engendrement d’un démon, et qui avait volé son sang immaculé pour que mes yeux toujours s’ouvrent de nouveau au crépuscule.
La trahison qu’elle avait accomplie pour moi lui était insupportable. Elle avait refusé mon sang en retour, et La Mort l’avait étreinte, la laissant succomber aux blessures qu’elle avait jadis tenté de guérir en moi.
Et je pleure à présent, je pleure l’éternité à passer sans elle, la douceur de sa peau laiteuse, et la beauté d’un corps qui n’aurait jamais du connaître ce que je lui avais dévoilé. Son nom est comme une blessure en moi. Je hurle au ciel, je déplore la cruauté de la vie. Et pour la première fois, j’implore Celui pour qui je n’ai jamais prié. Je la réclame, à corps et à cris…
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Stonnik




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MessageSujet: Re: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptySam 18 Nov - 11:39

... brrr... Délicieusement macabre à souhait.
Je ne suis pas correcteur, et j'ai lu que tu corrigeais sur S5.
Il y a cependant cette formulation qui m'a fait un peu mal aux oreilles, dans le contexte présent :
"Les autres sœurs, dépassées par l’étrangeté de ma langueur, l’avaient chargée de me rendre visite ..."

Brrr, j'en ai encore froid sur la nuque.... pale
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Bloody Rose

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MessageSujet: Re: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptySam 18 Nov - 11:54

Qu'est-ce qui te gêne exactement dans la phrase que tu m'as citée ?
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Stonnik




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MessageSujet: Re: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptySam 18 Nov - 12:05

il s'agit de l'expression "dépassées" qui me semble un peu familière en comparaison des tournures de phrases et de la richesse du vocabulaire de la narratrice dans le reste de la nouvelle. Je te le dis sans animosité, c'est une remarque que je fais tout à fait naturellement et avec sincèrité,
-tu peux en tenir compte ou pas, Bloody Rose.
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Bloody Rose

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MessageSujet: Re: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptySam 18 Nov - 12:42

Ok, il n'y a pas de soucis Wink Je suis bien la dernière personne qui prendrait mal des critiques, ne t'en fais pas pour ça.
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AstralRomance
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AstralRomance


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MessageSujet: Re: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptyDim 19 Nov - 4:11

Je ne me lasserai pas de te dire que j'aime énormément cette nouvelle Bloody Guynette, elle reflète exactement ton style et ton monde, et c'est l'une de mes préférées ! Bravo ma petite écrivaine !
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Bloody Rose

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MessageSujet: Re: Requiem pour une vierge   Requiem pour une vierge EmptyDim 19 Nov - 4:29

AstralRomance a écrit:
Je ne me lasserai pas de te dire que j'aime énormément cette nouvelle Bloody Guynette, elle reflète exactement ton style et ton monde, et c'est l'une de mes préférées ! Bravo ma petite écrivaine !

Merci ma guynette astrale. J'espère que le futur roman sera encore plus réussi.
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